SUTRA² – Suivi et Traitement du traumatisme des membres en cas d’afflux massif des blessés dans les contextes difficiles

Résumé

Le séisme du 12 janvier 2010 à Haïti a entraîné un afflux massif de blessés présentant des traumatismes des membres. Les amputés de tout âge peuplent les hôpitaux depuis lors. Les traitements apportés ont soulevé une controverse sur l’opportunité de certaines amputations. Certaines autorités médicales soulignent que des tentatives complètes de chirurgies reconstructrices devraient être entreprises avant d’effectuer le geste d’amputation.

L’étude projetée se propose de :

1/ Collecter les données nécessaires à une évaluation des traitements des traumatismes des membres à partir d’un échantillon large dans un suivi longitudinal,

2/ Discuter les méthodologies qui permettent de comparer les différents traitements apportés, et détailler leurs implications éthiques et économiques,

3/ Promouvoir une gestion intelligente du suivi de ces victimes du séisme à partir d’une évaluation de la qualité des soins.

ALIMA (The Alliance For International Medical Action) est une ONG internationale. Elle a pour but de développer des capacités locales et de mener des recherches opérationnelles dans le domaine de la santé. Depuis la soirée du 12 janvier, ALIMA, en partenariat avec une clinique Haïtienne, a organisé une prise en charge des victimes de tremblement de terre. Avec deux blocs opératoires et des spécialistes en chirurgie plastique et orthopédique, nous nous sommes occupés de 1 200 blessés, faits 780 gestes chirurgicaux et plus de 2 500 actes de soins. Dès le début nous avons décidé de mettre en œuvre un projet de suivi de nos patients sur plusieurs mois, d’établir un programme de chirurgie reconstructive et donc de tenter de sauver les membres de nos blessés. Une collecte des données prospectives a été mise en place la première semaine de notre activité à Port au Prince.

L’étude projetée vise à déterminer les modes les plus appropriés de la prise en charge des traumatismes des membres dans un contexte où pèsent de multiples contraintes. Les enjeux portent à la fois sur des aspects locaux, propres à la réussite du plan de reconstruction d’Haïti, et des aspects sur le caractère d’une expérience transposable dans la gestion des situations post-catastrophiques, et plus généralement dans la prise en charge des traumatismes sur les membres. Pour les aspects locaux, l’avenir d’Haïti est hypothéqué par les aspects psychologiques de la vie des haïtiens après le séisme, et plus particulièrement par celles des personnes victimes du séisme du 12 janvier. Des données précises, une évaluation fine et complète de la gestion des traumatismes des membres sont nécessaires pour la société haïtienne dans son projet collectif de reconstruction.

Les enjeux de la prise en compte de cette dimension psychologique dépassent le simple cas de cette décision amputation/reconstruction en Haïti. Les enjeux sont d’abord d’ordre éthique pour la médecine des catastrophes, et plus généralement concernent la place de la qualité de vie dans les évaluations préalables à une décision médicale. Les enjeux sont ensuite du côté de la gestion d’un système de santé et de la place des plus démunis dans celui-ci.

En résumé, cette évaluation d’une décision médicale possède une grande exemplarité pour les domaines de l’éthique, de la performance d’un système de santé et de la lutte contre la pauvreté.